De rue en rue, pas à pas, elle avait parcouru la ville presque en entier, réussissant malgré elle à se perdre. En fait, elle avait fait la bourde de vouloir prendre le bus et s'y était endormie, manquant son arrêt et se retrouvant dans un coin qui lui était inconnu, un endroit des plus populaires auprès des jeunes. En effet, sa petite mésaventure l'avait menée au centre commercial. Elle avait un peu d'argent sur elle, mais elle ne voulait pas nécessairement acheter quelque chose et elle ne connaissait pas les boutiques. Le poids de son sac sur son dos la rassurait. Même les fins de semaines, elle le traînait avec elle. C'était la chose essentielle à sa survie dans cette ville qui lui semblait encore nouvelle et pleine de mystère. Elle avait donc avec elle tout ce qui lui était de plus précieux, c'est-à-dire son ordinateur portable, son mp3, quelques livres en provenance de la bibliothèque et son matériel de dessin qu'elle traînait pour le simple plaisir de l'avoir à portée de main. Lentement, elle se promena, réussissant à trouver - après une éternité- la foire alimentaire et un endroit où ouvrir son ordinateur afin de trouver son chemin, par bus ou non, jusqu'à l'institut. À partir de l'école, elle savait, à partir de la bibliothèque aussi, mais c'était la première fois qu'elle se retrouvait au centre commercial, elle qui n'était pas la plus folle de shopping au monde, ses intérêts se trouvaient plus dans les endroits tranquilles.
La pile de son ordinateur indiquait qu'il lui restait environ trente minutes pour trouver ce qu'elle cherchait avant de se fermer et comble de malchance, le réseau surchargé rendait la navigation lente et difficile. Elle réussit cependant à se rendre jusqu'au site web du réseau d'autobus et se rendit presque ;a la page voulue avant que l'écran ne devienne noir, le petit pourcentage restant insuffisant pour lui permettre de continuer. C'était bien sa chance qui partait en courant. Elle ferma l'ordinateur portable et sortit son carnet de dessin, décidée à attendre que quelqu'un passe et la remarque. Après tout, il devait bien y avoir quelqu'un pour lui indiquer le chemin, surtout que son cellulaire avait été laissé dans sa chambre, en train de se recharger depuis le matin. Les tables aux alentours étaient presque vides à cette heure là et elle faisait tache avec son sac et ses crayons sortis pêle-mêle sur la table à la surface relativement propre. Cherchant vaguement une inspiration, une idée de dessin, elle tapotait la table de son crayon, suivant un rythme qu’elle seule entendait. Elle regarda autour, refusa l’idée de dessiner des jeunes au centre commercial, voulant opter pour quelque chose d’absent, pour quelque chose qui ne viendrait que d’elle.
Elle commença par des formes courbes, triangulaires et rectangulaires, ce qui au bout d’un moment, donna un chat vaguement esquissé, debout, les fesses bien hautes, prêt à sauter sur sa proie. Elle ajouta des détails, lui donnant un air joueur, mignon, un petit chaton aux joues rebondies et bouffantes, de celles qu’on voudrait flatter et de grands yeux s’émerveillant devant le monde. Elle esquissa alors une souris mécanique au sol, un divan dans le fond et un enfant assis, flou, regardant l’animal jouer. C’était un dessin relativement simple, non planifié, mais tout de même satisfaisant. Elle passa encore quelques minutes à détailler le poil du chaton, à mettre des ombres et lumières sur la scène, laissant cependant les traces du sketch sur son œuvre, sa façon à elle de montrer que ce n’était rien de trop sérieux, un simple croquis qu’elle s’était amusée à réaliser, perdue qu’elle était dans cette ville qu’elle devait encore découvrir, dans cet endroit qui allait être son chez-elle. Dans cette ville où elle demeurerait loin de ses parents jusqu’à Noël au minimum. Elle poussa un léger soupir de lassitude; il n’y avait pas qu’elle qui s’était perdue, ses pensées aussi étaient allées s’égarer quelque part dans les méandres de son esprit imaginatif.
Accueil 
